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Vu au Sénégal Le port de Dakar cultive sa vitalité

Dakar a été classé meilleur port à conteneurs d'Afrique subsaharienne en 2024 par la Banque mondiale et S&P Global Market Intelligence..

Plateforme stratégique d’import-export, poumon économique du Sénégal, le port autonome de Dakar, qui fait la fierté du pays, joue un rôle essentiel dans le développement du continent africain.

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Situé à l’extrême ouest de l’Afrique, le port de Dakar constitue depuis plus d’un siècle la principale porte d’entrée et de sortie du Sénégal. Grâce à sa position géographique à la croisée des routes maritimes reliant l’Europe, l’Amérique et l’Afrique, il s’impose de plus en plus comme un hub logistique majeur de la façade atlantique africaine.

« Nous avons un avantage unique, c’est, quand on arrive d’Europe ou d’Amérique du Nord, d’être le premier port touché en Afrique qui bénéficie d’infrastructures de qualité », resitue Étienne Sarr, président de l’Usetta (Union sénégalaise des entreprises de transit et de transport agréées) et lui-même patron d’une société de transit. « Un port, c’est comme une usine avec des entrées et sorties de marchandises. Celui de Dakar est particulièrement efficace, car il dispose d’un guichet unique pour toutes les marchandises, tout est facilement traçable. »

Etienne Sarr, président de l'Usetta, craint que l'influence européenne baisse dans les sources d'approvisionnement au profit de la Chine, de l'Amérique et de la Russie. (© C. DEQUIDT)

90 % du commerce extérieur

Créé en 1865 et modernisé au fil des décennies, le port s’est transformé en une plateforme maritime performante, capable d’accueillir des navires de nouvelles générations et de traiter plusieurs millions de tonnes de marchandises chaque année. En 2025, le trafic total du port dépassait 6,7 Mt au premier trimestre, soit une croissance de 27 % par rapport à la même période de l’année précédente. « C’est un indicateur de sa vitalité et de son rôle moteur dans l’économie sénégalaise. Mais il faut rester vigilant pour les prochaines années et ne pas se faire submerger », précise Jean Louis Tine, chef de douane.

90 % du commerce extérieur du Sénégal passe par Dakar. Les importations concernent principalement les produits de première nécessité comme les céréales (riz, blé, maïs), les produits pétroliers, les engrais, les matériaux de construction et les biens de consommation. Pour les exportations, elles sont dominées par les produits agricoles (arachides, noix de cajou, fruits), les minerais, et les produits halieutiques. Le port joue un rôle crucial pour la sécurité alimentaire et la souveraineté économique du pays.

12 % du PIB national

Sans ses infrastructures, le Sénégal ne pourrait ni importer efficacement les denrées nécessaires à sa population, ni exporter la richesse de son agriculture et de son industrie. Il contribue également de façons directe et indirecte à la création d’emplois : plus de 25 000 emplois dépendent de ses activités, entre dockers, logisticiens, transitaires, armateurs et services annexes. Sa contribution au PIB national est estimée à plus de 12 %, selon les données officielles. « Nous voulons poursuivre la croissance du port en le rendant encore plus qualitatif, s’enthousiasme Étienne Sarr, mais aussi en captant des volumes de pays comme le Mali, le Niger, le Burkina… dont une part des marchandises vont à Abidjan (Côte d’Ivoire). À nous d’être meilleurs qu’eux. »

Mais tout cela ne pourra se faire que dans la sérénité. « Pour l’instant, nous avons une belle stabilité, poursuit-il. Il ne faudrait pas que la nouvelle politique du gouvernement gâche cette harmonie. L’influence européenne risque de baisser dans les sources d’importation au profit de la Chine, de l’Amérique et de la Russie, avec des prises de position parfois extrémistes. »

900 000 t de blé importées

Le Sénégal dépend des importations pour couvrir ses besoins en produits alimentaires et agricoles. Le port de Dakar dispose d’infrastructures adaptées au traitement des cargaisons agricoles : silos, entrepôts frigorifiques, terminaux vrac et installations de déchargement rapide. En 2024, les importations de riz et de blé représentaient ensemble plus de 40 % de la valeur totale des importations agricoles, avec 900 000 t de blé et près de 1 Mt de riz. Ces cargaisons proviennent majoritairement, pour le riz, d’Asie (Inde, Thaïlande, Vietnam), et pour le blé, d’Europe (France, Pologne, Lituanie) et de Russie. Les oléagineux et les huiles végétales sont importés pour une transformation locale. Le port s’est aussi spécialisé dans l’importation d’intrants agricoles comme les engrais et les produits phytosanitaires. En 2025, il a réceptionné plus de 74 000 t d’urée, dépassant les objectifs prévus pour la campagne agricole 2025-2026.

Pour l’instant, le pays ne peut pas faire face à ses besoins en céréales, blé et maïs. Comme dans tous les pays africains, le blé est au cœur des débats et de la nourriture. « L’agriculture locale est non seulement trop artisanale, mais nous n’avons pas encore trouvé les variétés de blé, aussi bien blé tendre que blé dur, en dépit des efforts de notre institut de recherche. Il faut donc tout importer. Le blé français et européen reste notre référence », précise Franck Bavard, directeur général adjoint des Grands moulins de Dakar. Le nouveau contexte politique aura-t-il une influence sur les sources d’approvisionnement ? Personne aujourd’hui ne peut répondre à cette question.

L'agriculture sénégalaise, encore très artisanale, ne peut subvenir aux besoins en céréales du pays. (© C. DEQUIDT)

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